Projet Nola Is Calling
Nova
Nola Is Calling, l'électro-pop
vaudoue de la Nouvelle-Orléans
Mais la Nouvelle-Orléans est aussi le berceau d’un style tout particulier de dance music, la « Bounce », affiliée à la communauté queer. Pour mêler tradition et modernité, la journaliste française Elodie Maillot, à l’initiative du projet, est donc allée faire se rencontrer des musiciens issus à la fois des Black Indians et de la Bounce. En découle un album, Sewing Machine Effects, où les chants rituels se marient au hip-hop et à l’électro. Un étonnant projet produit par le multi-instrumentiste David Walters, et mené par un premier extrait au refrain jubilatoire: « Downtown », qui accompagnera parfaitement cette journée festive.
RFI music
Avec Nola Is
Calling, le label d’électro Jarring Effects est parti dans les pas des Black
Indians de la Nouvelle-Orléans. À l’initiative de la documentariste Elodie
Maillot, il propose une création passionnante qui fait le lien entre ces
descendants d’esclaves qui se sont libérés de leurs chaînes et les rythmes
africains. Le musicien explorateur David Walters, qui a été le producteur
musical de cette aventure, nous l’a racontée. Au cœur de tout, il y a le lien
entre les deux rives de l’Atlantique noires.
À la
Nouvelle-Orléans, le Super Sunday, la Saint-Joseph et le carnaval sont des
jours de défilés. Dans les quartiers bas de la ville, les chefs Black Indians
sortent leurs coiffes colorées, chantent et dansent. Les rituels de ces
Afro-Américains croisent alors la mémoire de leurs ancêtres esclaves qui
auraient trouvé refuge auprès des Indiens après s’être libérés de leurs
chaînes. C’est donc l’esprit des tribus amérindiennes que les Black Indians
commémorent durant les jours de fête, et c’est le chant de ces
"Indians" qui est le cœur du projet Nola is calling. Après Détroit,
au nord des États-Unis, et Le Cap, en Afrique du Sud, il s’agit du troisième
voyage du label d’électro lyonnais Jarring Effects qui parcourt les villes
musicales.
Pour explorer la
métropole du sud des États-Unis à sa façon, il a fait appel à la documentariste
Elodie Maillot, qui a notamment orchestré le retour des Béninois du Poly-Rythmo
de Cotonou par le passé. Au programme, plus de deux ans et demi de voyages à La
Nouvelle-Orléans pour la journaliste – et collaboratrice de RFI - alors
implantée aux USA, l’enregistrement d’un documentaire et d’un disque dans une
maison coloniale transformée en studio. Le casting a réuni six musiciens venus
d’horizons différents : deux grands chefs Blacks Indians, Jermaine Bossier
et Roméo Bougere, la figure de la bounce music*, Ha Sizzle, le
percussionniste béninois échappé du Poly-Rythmo, Bonaventure Didolanvi, le
violoncelliste Olivier Koundouno, et pour produire le tout, le chanteur David
Walters.
"Les
Blacks Indians sont des conteurs"
Le disque intitulé
Sewing Machine Effects mêle le hip hop, une musique électronique à la coule
et un violoncelle qui sert de fil rouge à l’auditeur. Il explore le lien entre les
rythmes venus du Bénin, la créolité des Caraïbes, et les chants de ces
"Mardi-Gras Indians" aux noms de famille bien français. "J’ai
découvert des artistes pétris d’envie, qui sont dans l’action,
s’enthousiasme David Walters. Souvent, ils bossent à côté. Ils sont
chauffeurs de bus, ils sont éducateurs, et ils prennent leur mission très à
cœur. Ce sont des artistes qui ont envie de faire avancer les choses et pas de
briller. Ce qui m’a marqué, c’est l’esprit de groupe. On parle de gangs
Indians, d’une communauté, d’une ville, d’un pays, plus que d’individus."
S’il y a le rythme
au commencement, on retrouve surtout un jeu de questions/réponses comme dans
beaucoup de musiques des afrodescendants. "Pour donner un exemple
populaire du call & response, je m’appuierais sur le morceau See-Line
woman de Nina Simone. Il y a toujours quelqu’un qui répond au chant lead.
Et c’est dans cet espace-temps, entre deux réponses, qu’on cale une phrase qui
raconte son histoire, explique Walters. Pour moi, les Blacks Indians sont
un peu les griots de La Nouvelle-Orléans. Dans leurs textes, ils vont raconter
leur histoire, celle de leur famille et de leur quartier. Ce sont des
conteurs." Ce jeu permanent a permis aux titres d’émerger durant des
enregistrements saisis sur le vif, entre des musiciens qui ne se connaissaient
pas pour la plupart.
Une photographie
de La Nouvelle-Orléans des quartiers populaires
Mais ce qui
surprend surtout dans cette "photographie contemporaine de la
Nouvelle-Orléans, des quartiers populaires", c’est l’absence de ces
clichés qu’on pourrait facilement avoir en tête. Il y a une joie de vivre
certes communicative (Whodat, Take the crown), mais on est loin
des brass band et du jazz prisés des touristes. La légende de ce projet habité
par les esprits qui rodent tout le long raconte que les présentations ont été
faites sur une lecture du Code noir, l’édit royal publié à la fin du XVIIe
siècle qui régissait l’esclavage dans les colonies françaises, préambule à
cette histoire ancrée au contraire dans un élan de "liberté".
Le souvenir de
l’ouragan Katrina, qui a dévasté la ville à la fin du mois d’août 2005, se
glisse aussi entre les lignes et reste très palpable dans le documentaire
appelé Call & Response. "Ce qui est très fort à La
Nouvelle-Orléans, c’est que cette ville a été rasée et qu’elle se reconstruit
aujourd’hui encore. Les musiciens sont acteurs de cette reconstruction. Vous
imaginez, c’est un endroit qui a été déserté ! Ceux qui sont restés, qui
avaient encore un toit, se sont unis pour sauver les artistes, pour sauver la
communauté. C’est une ville de rescapés et de fait, c’est puissant",
estime David Walters.
Pour tous ses
acteurs, Nola Is Calling semble avoir été une parenthèse heureuse. Quant à son
producteur, il lui aura fallu un mois de travail pour que "la magie"
captée sur place opère durablement. Cet appel de La Nouvelle-Orléans un rien
mystique l’aura même porté vers l’enregistrement d’un nouvel album, plus
personnel cette fois-ci.
*Dérivé du hip hop
du sud États-Unis, la bounce music est une musique typique de La
Nouvelle-Orléans faite pour danser, notamment en faisant rebondir de façon très
expressive ses fesses.
Nola Is Calling Sewing Machine Effects (Jarring
Effects) 2019
https://www.facebook.com/NOLA.IS.CALLING/
Trailer
documentaire Call & Response : https://www.youtube.com/watch?v=ScDvZ7bLWwQ
1er
extrait de l’album Downtown : https://www.youtube.com/watch?v=TnKpqo4QOSM
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